« Coquine » est une grande créature rose qui porte bien son nom. Elle est signée
Leslie Bigelman, artiste new-yorkaise qui vient de s’installer à Monpazier et qui
a la ferme intention de faire bouger les choses dans cette légendaire bastide. Avec
Tony Crosbie, artiste irlandais, farouchement attaché à la liberté d’expression
qu’il considère comme le bien le plus précieux sur Terre, elle a fondé l’association
« Ouvrir l’Art Contemporain » qui présente jusqu’au 31 août 2008 une vingtaine
de sculptures audacieuses et enjouées, plantées comme autant de sentinelles enchanteresses
autour de la citadelle médiévale.
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Leslie Bigelman et Tony Crosbie, couple d’artistes organisateurs de l’exposition
collective « En plein air », avaient convié le 11 juillet
le public à rencontrer les artistes,
à la faveur d’une ballade tout autour de la bastide de Monpazier. Chaque artiste
a parlé de son oeuvre, et naturellement, l’inverse s’est produit aussi. Ces rapprochements
entre créations et créateurs ont permis aux promeneurs d’entrer de façon plus intime
dans leurs différents imaginaires, grâce à un échange simple et chaleureux.
Voici quelques propos capturés sur le vif, comme des papillons qu’il faut vite relâcher :
« Je suis mosaïste et j’ai choisi la calligraphie arabe pour la beauté, la
poésie et l’esthétique qu’elle suggère. Cette démarche artistique et spirituelle,
c’est ma façon d’avancer dans la vie. Je vis ma passion, c’est une véritable thérapie. »
Sylvie Hénot « Elévation ».
« J’ai représenté ici la famille telle que les gouvernements veulent qu’elle
soit : enchaînée par des besoins matérialistes créés de toute pièce par tout le
matraquage publicitaire de la télé, d’où le choix de cette couleur or qui évoque
le clinquant, l’inutile et ces chaînes qui symbolisent cet esclavagisme moderne.
Pour élever les enfants, il faut leur apprendre à aimer les gens plutôt que les
objets. »
Tony Crosbie « La Famille ».
« J’ai installé ce banc taillé dans la masse d’un superbe châtaignier pour
que l’on puisse s’asseoir et observer les œuvres en face. »
Philippe Claudy « Sofa ».
« La mère, je veux bien, mais le père y est aussi pour quelque chose. J’ai
sculpté cet homme qui porte son bébé en hommage à un ami disparu qui a beaucoup
souffert de la non reconnaissance de sa paternité. »
Maurice Bonnand « Paternité ».
« Je suis heureux de rendre hommage au petit patrimoine rural que constitue
ce lavoir grâce à ce personnage taillé dans la pierre de Paussac. »
Pierre Carcauzon « Le Témoin n° 180606 ».
« Cette Vénus représente les trois parties de la femme qui expriment ses rondeurs,
son côté charnel, sa fécondité : le bassin, le ventre et les seins. Elle est ici
près de la Fontaine d’Amour, un endroit prédestiné. »
Fabienne Lormeau « Vénus ».
« J’utilise des matériaux simples, fer à béton, vieille tôle, plexiglas, ici
pour représenter les échelles de l’existence : tordues, délicates, difficiles. Les
personnages essaient vaille que vaille de s’accrocher même si au bout, c’est l’impasse,
personne ne sait. Parfois en cours de route, ils arrivent à se rencontrer. »
Jean Vindras « Figures Libres ».
Depuis le début de ce voyage, nous suivons la belle Elsa, vêtue d’une jolie robe
violine et bottée de santiags noires. Elle fait le guide avec enthousiasme et bonne
humeur. Elle s’est associée au projet de Leslie et Tony et le porte avec fierté,
s’exprimant au besoin en l’absence d’un artiste :
« Ici Aurélien Moser, musicien, est intervenu le moins possible sur
une poutre de la maison qu’il restaure pour en dégager cette jeune femme gracile
posée non sans angoisse sur une balance afin de se peser. Cela dit beaucoup de chose
sur les femmes… certaines se reconnaîtront. »
Elsa Martin, photographe, au sujet de « Femme » d’Aurélien Moser.
Sur ce, une envolée en pleine science-fiction mâtinée d’une bonne dose d’humour
fut le plus sérieusement du monde déclamée :
« Cette pièce est issue des collections du Musée Intergalactique des Manipulations
Génétiques. Suite à la grande invasion virale du 24ième millénaire dont on se souvient
encore, cet organisme génétiquement modifié a été cultivé en champ d’équarrissage
pour résorber la viande impropre à la consommation. Comme vous pouvez le voir, il
s’agit d’un hybride entre un vautour et la dionée, plante carnivore. »
Patricia Molins « Droséra ».
« Cette vache a demandé 300 heures de travail. Elle a été réalisée à l’occasion
d’une manifestation organisée par la Croix-Rouge à Bergerac en 2002 intitulée «
Vachement solidaire ». Chacun pouvait y déposer un message pour exprimer sa révolte
face à la misère. »
Jean-Pierre Tauzia « Vache d’Enfer ».
« J’ai façonné « Coquine » en m’inspirant de mon amie Valérie. »
« Ainsi me voici toute nue face à vous, ce que je découvre » sourit la
Valérie en question.
« Au départ je modèle une petite pièce puis elle est enregistrée en 3D, agrandie
et découpée par un robot dans du polystyrène. Ensuite je l’enduis de jesmonite et
de peinture. »
Leslie Bigelman « Coquine (Valérie) ».
« Je suis potier à Monpazier. « Touche pas à ma fleur » associant
des fleurs blanches et des fleurs noires, c’est bien sûr un clin d’œil que chacun
comprendra. »
Stéphane Miglierina « Touche pas à ma fleur ».
« J’ai choisi des motifs universels pour réunir sur cet objet les quatre éléments,
l’eau, la terre, le feu, l’air, et rendre hommage à ce qui est le plus fragile et
qu’il faut absolument protéger. »
Fred Soula « Totem des 4 éléments ».
Toutes ces œuvres et bien d’autres sont à découvrir tout autour de Monpazier, jusqu’au
31 août prochain.
Sophie Cattoire
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